[English version below]
Chloé Hunault, LPC Yangon, Myanmar,
Coach du programme MyanMade
25 mars 2020
Premier week-end de confinement plus que bienvenu! Nos journées sont rythmées par le thé glacé, de la musique en tout genre, le soleil et les jeux: Times up, code name, petit bac et autres jeux de cartes en tout genre. On se fait chacune une bassine d’eau et une sorte de chaise longue made in LP4Y (une palette quoi) pour nous donner la sensation d’être au bord de la piscine à domicile. On fait comme on nous a dit: on se repose, on prend le temps, on partage ensemble, on rit et on passe de bons moments. Je sens que la coloc prend son rythme, chacune trouve sa place et ce confinement nous permet finalement de se rapprocher, se connaître plus rapidement et j’ai l’impression que tout le monde s’en réjouit. Avec Claire nous toquons à la porte du voisin pour lui emprunter son baby-foot mais personne ne répond. Il ne perd rien pour attendre... J’en profite aussi pour reprendre un peu le lien avec mes proches en France: confcall avec mes anciennes collègues d’amour, marrade avec mes amies d’enfance, FaceTime avec ma famille (ma petite maman qui ne parvient toujours pas à comprendre l’intérêt de parler devant l’écran :) et les messages auxquels je n’avais pas pris le temps de répondre. On finit ce bon week-end par une soirée crêpes et projection Netflix dans le salon: Un + Une, film tourné en Inde, ce pays qui me manque tant... Mardi matin il est temps de retrouver mes Youth, je suis surexcitée, la sensation de ne pas les avoir vu depuis des semaines alors que ça fait à peine 5 jours !! J’ai le sourire, le cœur qui bat, j’ouvre notre portail comme une gamine qui ouvre son carnet secret. La nouvelle tombe juste avant 8h30: 3 cas...le gouvernement commence enfin à communiquer. Une bonne chose car les birmans commencent à prendre conscience de la situation. Mais nos Youth également...et lorsque je récupère ma team pour leur donner leurs allowances, ce n’était plus le même regard satisfait que je leur connais quand je leur distribue enfin l’argent qu’ils ont dûment mérité. C’est un regard inquiet, un regard pensif, un regard qui me crie de les rassurer, un regard qui est encore plus profond du fait que l’on porte un masque. Je ne voulais pas le porter, je ne voulais pas créer encore plus de distance entre eux et moi, je voulais leur donner un sourire à défaut d’une tape dans le dos. Mais ma coordo Claire m’a raisonné, et je réalise qu’il est plus facile de tromper les gens avec son sourire qu’avec ses yeux. Les yeux ça trompe pas, les yeux ça dit tout, les yeux ça supporte pas de masque. Je me bats contre ce langage qui était devenu mon préféré pour leur montrer qu’ils peuvent compter sur nous pour redoubler d’efforts afin de les accompagner dans cette guerre qui est la nôtre, à nous tous. Je m’efforce de croire qu’il n’y a plus de riches et de pauvres face à la contamination mais je regarde autour de moi et quand je repense à mon confinement du week-end, je réalise que le leur sera nettement différent. Comment leur dire qu’ils n’auront pas de problèmes s’ils restent chez eux? Chez eux avec 10 autres personnes sans masque dans la même pièce? Chez eux sous 40 degrés sans un souffle d’air? Chez eux sans pouvoir travailler et ramener le peu d’argent qui sert à nourrir toute une famille? Chez eux où l’hygiène est plus que précaire? Et pourtant je n’ai hélas pas d’autres pouvoirs. C’est eux les héros, pas moi. Alors j’espère encore une fois qu’ils seront plus forts que moi, qu’ils sauront trouver quoi faire sans mettre leurs vies en danger. Avec Bérénice nous décidons le soir même de créer un groupe Facebook avec nos teams respectives afin de communiquer plus facilement, de leur donner quelques exercices et d’apporter un peu de fun dans cette période qui s’annonce compliquée. Ça marche, les jeunes se confient, nous écrivent, nous envoient même des photos,...ouf ils sont là! Je les vois et même si ce n’est que à travers un écran, je ne porte plus de masque. Et je peux leur sourire à nouveau...
Chloé Hunault, LPC Yangon, Myanmar, Coach of the MyanMade programm
First week-end of lockdown is more than welcome! Our days are marked by iced tea, all sorts of music, sun and board games : Times Up, Codenames, “Petit Bac” game and other cardboard games. Each of us make herself a basin of water and a kind of a deck chair made in LP4Y (actually, a pallet) in order to give us the feeling of being alongside the pool, at home. We do as it was told to us : we take rest, we take the time, we share, we laugh and we spend good moments together. I feel like our flat sharing is finding its rhythm, each of us is finding her place and this lockdown eventually allows us to get closer, to know each other faster and it seems to me that everyone is delighted by that. With Claire, we knocked on the neighbour’s door to borrow his foosball table but no one answered. He’ll get what he deserves later… I’m also taking this opportunity to reconnect a bit with close friends and family : conf. call with my beloved former colleagues, good laugh with my childhood friends, FaceTime with my family (my little mom, who still doesn’t understand the interest to speak in front of a screen) and the messages which I hadn’t taken the time to respond to . We end this great week-end with a crepes party and Netflix screening in the living-room : “Un + Une”, a movie shot in India, this country I missed so much…
Tuesday morning, it’s time to see the Youths again, I am overexcited, I feel like I didn’t see them for weeks when it has been only 5 days !! I have a big smile, my heart is pounding, I unlock the door as a little girl who opens her secret diary. The piece of news is falling just before 8.30a.m.: 3 cases… the government finally begins to communicate. It’s a good news because the Burmese can become aware of the situation. That also applies to our youths… and when I take my team back to give the allowances, the youths don’t have anymore this satisfying look they have when I give them their well-deserved money. It’s a concerned, thoughtful look, a look which says the need of being supported, a look even deeper in the light of the fact we are wearing masks. I didn’t want to wear it, I didn’t want to create this distance between them and I, I wanted to give them a smile with the impossibility of a pat on the back. But my coordinator, Claire, reasoned with me, and I realize that it’s easier to fool someone with a smile than with eyes. The eyes can’t cheat, the eyes say everything, the eyes can’t bear a mask. I fight against this language, which had become my favorite, to show to the youths that they can rely on us to strengthen our efforts to accompany them in this war, the war of all of us. I strive to believe there aren’t the wealthy and the poor anymore regarding the contamination, but I look around and when I recollect my containment of the week-end, I realize that theirs will be different. How could I say they won’t have problems if they stay at home? At home, with ten other people without masks in the same room? At home, under 40 degrees without a breath of fresh air? At home, without the possibility to work and to bring the little money which feeds a whole family? At home, with a poor hygiene situation?
Unfortunately I don’t have any other powers. They are the heroes, not me. So I hope, one more time, that they will be stronger than me, that they’ll find solutions without endangering their lives.
With Bérénice, we decide by evening to create a Facebook group with our respective teams to communicate in an easier way, to give them a few exercises and to bring some fun to them in this period looming hard and complex. It goes well, the youths talk to us, send us some pictures… Phew, they are right there! I can see them, and even if it’s only through a screen, I don’t have to wear a mask anymore. And I can start again to smile to them...
Comments